Dumont d'Urville, 28
juillet 2009
Nous
avons laissé la Midwinter déjà plus d'un mois derrière nous, et le
temps semble filer à bonne allure depuis. L'actualité adélienne est,
comme pour tout mois de juillet, dominée par la naissance des jeunes
manchots empereurs, que nous avons pu constater tout au long du mois.
D'abord peu nombreux, ceux-ci sont maintenant partout à la manchotière,
qui constitue ainsi, plus que jamais, une destination de promenade de
premier choix. L'autre élément incontournable est la météo, dont je
suis responsable sur la base. Après une Midwinter que nous avons eu la
chance de vivre sous un ciel plutôt clément, le mois de juillet a
démarré dans le blizzard, les vents forts et abondantes chutes de neige.
Fait remarquable, il a sans doute temporairement
dégelé le 2 Juillet en fin de journée : la station météo a
enregistré -0,1°C au plus doux, mais compte tenu des incertitudes de
mesure, il est possible que le dégel ait eu lieu, dans notre abri où
nous mesurons la température. Car le dégel ne faisait pas trop de doute
sur les passerelles de la base, rendues bien glissantes par l'apparition
d'une fine couche de glace en cours de journée. Heureusement que les
vents n'étaient pas trop forts à ce moment là, sinon les déplacements
auraient été bien compliqués... Nous avons reçu une petite bruine tout
à fait inhabituelle en cette saison ce jour là, responsable du verglas
sur les passerelles. Il faut remonter au 5 Juillet 1990 pour trouver trace
d'une température aussi douce en juillet (+0,1°C), c'est donc plutôt
rare...
Le corollaire de ce mauvais temps persistant, allié à
la douceur, fut une importante débâcle qui a amené la mer aux portes de
DDU, puisque la croix Prudhomme avait les pieds dans l'eau au début de
mois. L'eau était aussi présente derrière la piste du Lion, nous
coupant pour un moment l'accès au Nord-Est de la base. La présence de la
mer fut certes indésirable pour nos promenades, en revanche les
contrastes de lumière que cela a provoqué furent de toute beauté. Le
paysage était plus beau avec cette mer à nos portes, un avis qui fut
assez largement partagé. Il ne s'agissait pas à proprement parler de
l'Océan Austral, mais simplement d'une polynie, d'abord présente au
Nord-Ouest de la base, et qui n'a cessé de s'élargir par la suite.
Après une première décade de juillet franchement
maussade, le temps s'est calmé et le soleil est revenu. Il ne nous a
quittés que temporairement pendant les deux semaines suivantes, nous
avons ainsi pu profiter de superbes journées pour les promenades. De
plus, il n'a pas fait très froid, ce qui fait que les conditions étaient
excellentes pour rester de longues heures dehors, souvent en l'absence de
vent sensible. Ces conditions plutôt douces ont cependant ralenti la
formation de la banquise sur la polynie. Notons que c'est la première
fois depuis qu'on fait des mesures à Dumont d'Urville (plus de 50 ans),
que les -25°C n'ont pas encore été atteints fin juillet, une façon de
traduire la douceur de notre hiver jusque là.
Signalons un autre fait météorologique remarquable
pour ce mois de juin : la pression remarquablement élevée : elle a
atteint 1027.4hPa (pression réduite au niveau de la mer) le 10 Juillet.
Une telle valeur de pression n'avait plus été relevée depuis le 6 Août
1995 à DDU, tous mois confondus. C'est d'autant plus rare qu'aux
latitudes voisines du cercle polaire, les pressions sont en général plus
basses qu'aux latitudes tempérées, où une telle valeur de pression est
commune...
Enfin, le mois s'est achevé par une forte tempête : le
27 Juillet au soir, on a atteint 187km/h au sein d'une dépression très
creuse, les congères ont atteint un niveau remarquable, le toit de
certains bâtiments (BT/météo, Géophy, et même le 42, dans une moindre
mesure) n'est plus très loin, et l'hiver n'est pas fini... Espérons que
le mois d'août nous réserve encore une bonne part de belles journées,
au milieu des inévitables périodes de tempête de saison...
François Gourand, responsable météo TA 59