Début d'hivernage en
Terre Adélie
Depuis le vingt sept février, jour où, pour la
dernière fois de l'été austral, l'Astrolabe a largué ses amarres de
l'archipel de Pointe Géologie, vingt six hivernants ont entamé huit mois
de huis clos.
La transition avec la campagne d'été est assez brutale
: le calme nous surprend. Fini les bruits des moteurs montant de l'île du
Lion en pleine activité, fini la compagnie de la turbine de
l'hélicoptère. Et surtout, fini les cris des manchots adélie. Il faut reconnaître
qu'ils demeurent les habitants prépondérants de la base
pendant la période estivale, petits compagnons toniques et bruyants. Nous
avons suivi l'éclosion des œufs, la croissance de ces petits poussins,
leurs premiers pas, leur première mue, leurs manèges incessants à
réclamer à manger aux parents. Et leur départ en mer finalement.
Beaucoup
de découvertes marquent les débuts d'hivernage. Le temps change, les
premières tempêtes apportent les premiers flocons et les premières
congères. On apprend à se déplacer sur les passerelles par grand
blizzard. La nuit progresse, la voûte étoilée de l'hémisphère sud se
révèle enfin, et les premières aurores australes enchantent. On assiste
au gel de la mer, couche de glace fragile qui débâcle encore au gré des
coups de vent…
Un jour enfin, une grande nouvelle dans ce petit monde :
les premiers manchots empereurs arrivent. C'est un vrai plaisir que
d'assister au retour de nos voisins d'hivernage, nous suivrons leur cycle
de reproduction sur la banquise entre l'île et le continent. Et nous
repensons inévitablement avec émotion au jour de notre arrivée où nous
avons été contempler, un peu dépassés par les évènements, sous le
soleil de la nuit australe et le compagnonnage de nos prédécesseurs, les
poussins de l'année sur la manchotière…
Ces premières semaines ont confirmé la bonne humeur et
le bon esprit de la TA59, travail et convivialité s'organisent.
L'hivernage s'annonce des plus positifs. Et dans les jours à venir c'est
une autre étape très attendue qui se profile : quitter l'île pour la
banquise enfin assez épaisse et stable, de belles promenades et de
nouvelles découvertes en perspective…
Caroline Hallé, médecin de la
59ème mission