Dumont
d'Urville, le 11 avril 2010,
Depuis
maintenant 6 semaines, l'hivernage a désormais commencé à la base
Dumont d'Urville, sur l'île des Pétrels. En effet, le 27 février, en
fin de matinée, l'Astrolabe, le navire de logistique polaire, est sorti
du Chenal du Lion, sous les regards émus des 26 hivernants de la "TA
60". Nous nous étions réunis sur le Cap des Léopards pour un
dernier au revoir à nos compagnons de la campagne d'été.
Comme elle a
été intense, cette campagne d'été ! Il a bien sûr fallut prendre
possession de nos postes, des lieux, découvrir les rythmes propres à
cette vie hors des voies traditionnelle de navigation. Les passages ont
pourtant été nombreux sur cet Archipel de Pointe Géologie, entre les
rotations de l'Astrolabe, les avions de D10, les départs et retours de
Raid. Combien de moments inoubliables, de rencontres si enrichissantes...
Mais,
désormais, le huis clos tant attendu a commencé, paisiblement. Le groupe
prend de nouvelles habitudes, les rythmes de vies se modifient encore.
Tout est plus calme, sur cette base. Mais toujours tellement passionnant.
Les jeunes
manchots Adélies, que l'on a vu naître fin décembre, sont déjà partis
en mer, pour des destinations mal connues. Leurs parents sont revenus muer
et sont déjà repartis. La nuit a fait sont apparition, nous permettant
de refaire l'expérience rafraîchissante du "matin" et de ses
lumières pleines de promesses, presque oubliée après deux mois de jour
permanent. Elle est revenue d'abord timidement, et maintenant prend
pleinement possession du ciel adélien à une vitesse étonnante, laissant
apercevoir nos premières aurores australes.
Et puis, enfin,
la banquise s'est formée. Timidement. Mais nous avons pu faire nos
premiers pas hors de l'île depuis décembre. Quel rafraîchissement de
pouvoir sortir, de voir l'île sous un autre angle, nous rapprocher un peu
d'un horizon que nous voulons explorer, toujours le même depuis si
longtemps, et pourtant toujours changeant au gré des marées, du vêlage
du glacier de l'Astrolabe, et du soleil.
Et puis, nous
avons pu approcher un peu les premiers manchots Empereurs, arrivés un peu
en avance. Quel plaisir de voir ces bipèdes nonchalants (non, l'homme n'a
pas inventé la marche !) se déplacer sur la glace avec une élégance si
fascinante, sur un rythme si calme, serein, mais déterminé. Mais la
banquise a été soufflée par une tempête de neige, la vraie première
depuis notre arrivée (le vent a été enregistré à 186 km/h, le record
pour l'instant pour cette année), nous confinant à nouveau. Mais nous
regardons de loin la rookerie prendre forme et volume, entre l'île Jean
Rostand et le Nunatak du Bon Docteur, dans la bien nommée Baie des
Empereurs. Bientôt, nous pourrons repartir sur la banquise...
Marc Andrieux (médecin
de TA60)