VOYAGE AU PAYS DES MANCHOTS

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Description

Impossible, tant par la forme que par le fond et surtout l’intérêt de confondre ce livre avec un autre au titre presque identique : Au pays des manchots, récit du voyage de la Belgica, par Georges Lecointe, Scheppens et Cie, Bruxelles, 1904.

Ce Voyage au pays des manchots se veut la synthèse d’une dizaine de voyages réalisés en famille, sur notre voilier, en péninsule Antarctique et Géorgie du Sud, entre 1988 et 1996 (p. 9).

Tristesse que cette dizaine de voyages du Croix Saint Paul II dans des lieux aussi magiques soient résumés dans ces lénifiantes quarante-six pages, moins encore après retrait des citations d’Anatole France, de Jean-Baptiste Charcot et des passages s’y rapportant.

A partir de notes, supposées du moins, et d’observations de quelques espèces de manchots est offerte à notre curiosité navrée une alternance de paragraphes sur la biologie des Sphéniscidés et de souvenirs personnels. Jamais ce texte n’aurait dû quitter le cadre familial auquel il semble destiné. C’est une chose de conter une histoire à son enfant avant qu’il ne s’endorme, une autre de la coucher sur le papier (pp. 22-23) et de la rendre attractive pour tout un chacun ; seule peut y parvenir une bonne plume, telle Selma Lagerlöf dans son Merveilleux voyage de Nils Holgerssons. A ce propos, puisqu’en quatrième de couverture l’auteur(e) nous est présentée comme doctorante, peut-être n’a-t-elle pas connaissance des instructions et conseils généralement dispensés aux étudiants dans le cadre des formations doctorales :

(…) La rédaction ne doit pas intervenir en fin de travail : elle est le travail (…) Elle doit être claire, clarifiante, apporter la lumière (…) Elle doit être informative, argumentative: il ne s’agit pas de tirer à la ligne, de faire du remplissage (…) Il est normal d’utiliser les possibilités énonciatives qu’offre la langue; Le je n’est pas interdit; cependant lorsque vous utilisez on ou nous par contre il est important que ce à quoi ces termes réfèrent soit précisé, repérable. Attention aux répétitions, aux consonances…

Pour vous convaincre que certaines de ces consignes n’ont pas été suivies, prenez un marqueur et, à la page 25, surlignez les mots commençant par qu-, à la page 34 les son, sa, ses et autres mots commençant par un s: une vingtaine de plages colorées apparaîtront sur la première, plus de deux douzaines sur la seconde, ceci en une trentaine de lignes pour chaque… N’insistons pas, cela serait pris pour de l’acharnement. Passons aussi sur quelques inexactitudes.

Sont difficilement supportables la confusion, systématique et voulue, des manchots avec les pingouins, l’anthropomorphisme constant, frisant parfois le grotesque, les sentiments prêtés aux animaux, les interprétations hasardeuses. Ce qui était admissible il y aura bientôt un siècle ne l’est plus aujourd’hui : l’éthologie s’est développée depuis ; reprise aujourd’hui la sensibilité d’un Charcot dans ses écrits antarctiques devient sensiblerie, compassion ridicule.

A neuf reprises sont reproduits des dessins, tous tirés d’un livre que les lecteurs de la Lettre connaissent bien: Les manchots, écologie et vie sociale (Le Rocher, 1988). Reproduites sans les mentions d’origine, privées de leurs légendes, ces illustrations qui correspondaient à des textes précis perdent ici une part ou presque totalement (p. 31) leur sens, d’autant plus que concernant souvent des espèces non citées ou non vues par Marie Foucard. Laissons la délirer dans sa vision toute personnelle, fantaisiste et utopiste des liens nous unissant à (s)es amis les manchots qui (l)‘ amène à (s)e poser la question de savoir si ce grand pingouin n’était pas le maillon manquant qui unissait les manchots aux hommes. (p.52 & 53). (…) Je reviendrai vous rendre visite, petits manchots. Je reviendrai me frotter aux glaces de l’Antarctique, m’enivrer de vos cris, m’imprégner de vos conversations et de vos révérences (p. 55). Si suite il y a, espérons qu’elle ne sera pas du même tonneau.

Vient ensuite un « carnet de voyage », pas une relation mais une suite de 44 photos couleurs, les reproductions d’une aquarelle et de deux photographies anciennes, l’une du Français, l’autre du Pourquoi-Pas ? Leur qualité ne parvient pas à racheter la première partie, qu’après tout vous aimerez peut-être ; mais, fort heureusement, la plupart des acheteurs de ce genre de livres se contentent maintenant des seules images. La majorité d’entre elles sont de l’auteur, toutes possèdent une mention d’origine à côté ou en dessous de la légende ; aurait suffi un crédit en fin d’ouvrage, signalant seulement les photographies qui ne sont pas de l’auteur(e), ceci relève probablement du maquettiste ou de l’éditeur.

INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES

Marie Foucard.

Novembre 2001, Atlantica (3 rue Séguier, 75006 PARIS). Broché, 22 x 22 cm, 2 photos N&B, 45 photos couleurs, 9 ensembles de figures au trait, 120 pages.

ISBN 2-84394-433-3.