AU ROYAUME DES GLACES – L’impossible voyage de la Jeannette

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Description

Il y a des livres dont on déteste tourner la dernière page. Ce livre en fait partie, tant l’auteur sait nous transporter dans une époque, dans un contexte, dans un univers.

Nous ne suivons pas uniquement le récit d’une expédition polaire, nous partons en Amérique et en Europe pour sa préparation, puis en Arctique pour son déroulement à la fin du XIXe siècle, dans les années 1870. À cette époque, ce qui surprend, c’est que les théories se nourrissaient encore de mythes, fables et croyances et que les scientifiques et géographes semblaient s’appuyer plus sur ces convictions plutôt que sur des preuves réelles et qu’une certaine naïveté subsistait encore dans leurs décisions. Des variations sur l’idée de la mer polaire ouverte existaient depuis la période préhistorique. L’idée d’un endroit sûr, chaud sur le toit du globe – une oasis dans un désert de glace, une utopie polaire – semblait être profondément ancrée dans la conscience collective. Les Vikings parlaient d’un lieu à l’extrémité septentrionale du monde, parfois appelé Ultima Thulé, où les océans se vidaient dans un gigantesque trou qui réalimentait toutes les sources et les rivières de la Terre. Les Grecs croyaient en un royaume appelé Hyperborea, situé très au nord, où le printemps régnait éternellement et le soleil ne se couchait jamais. Newton postula que la planète était un sphéroïde aplati aux pôles, ce qui signifiait, si cela était vrai, que les terres et les mers polaires étaient plus près du noyau chaud de la terre et par conséquent étaient peut-être assez tempérées. À cette époque, James Gordon Bennett qui dirigeait le journal américain Herald – journal fondé par son père en 1835 – ne reculait devant rien pour alimenter ses colonnes de récits spectaculaires.

En 1869, il dépêcha un reporter en Afrique à la recherche de David Livingstone afin de ramener, pour son journal, des articles des plus originaux. L’Arctique et les régions polaires devenaient également un centre d’intérêt de plus en plus croissant, à l’image de certaines expéditions américaines comme celle du Polaris dirigée par l’explorateur Charles Francis Hall tentant sans succès d’atteindre le pôle Nord en 1871. On pensait de plus en plus que d’essayer d’atteindre le nord en longeant l’est de l’Amérique et l’ouest du Groenland n’était pas la meilleure des routes à suivre. James Gordon Bennett qui désirait financer une expédition polaire vers le pôle Nord pour continuer d’alimenter son journal, décida en 1877, de rencontrer le géographe allemand August Petermann afin de recueillir auprès de lui les conseils du plus grand cartographe de l’époque sur la meilleure des routes à suivre. Petermann prétendait que le courant chaud marin Kuroshio qui prend naissance au niveau du Japon et se propage dans l’océan Pacifique vers le nord jusqu’au détroit de Béring pouvait aider un navire à franchir la barrière de glace qui entoure l’Eldorado polaire. C’est ainsi qu’est née l’expédition de la Jeannette qui sera dirigée par George Washington De Long qui se fit remarquer lors de l’expédition de sauvetage du Polaris. La suite de ce livre nous offre la possibilité de suivre le déroulement de ce périple et des expéditions lancées à sa recherche. De Long et sa famille ainsi que tous les acteurs de cette aventure nous deviennent familiers. Voilà un livre que je conseille à tous ceux qui veulent s’immerger dans cette époque qui demeure certainement comme précurseur des futures expéditions polaires qui suivront à la toute fin du XIXe siècle et au début du XXe .

Gilles Troispoux

INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES

De Hampton Sides – Traduction de Sophie Aslanides – Préface d’Albert de Monaco

Septembre 2018 – Éditions Paulsen – Format 15 x 21 cm – 512 pages

ISBN : 978-2-35221-274-4.