PRÉSENTATION DE LA BASE DE KERGUELEN
SITUATION GÉOGRAPHIQUE
Informations Géographique
Les îles Kerguelen ou archipel Kerguelen forment un archipel français au sud de l’océan Indien. Elles constituent l’un des cinq districts des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF).
Elles sont éloignées de plus de 3 400 km de La Réunion, terre habitée la plus proche. L’île principale, la Grande Terre, qui couvre plus de 90 % de la surface, est la troisième plus grande île française (après la Nouvelle-Calédonie et la Corse) ; c’est également la plus grande de toutes les îles subantarctiques (devant la Malouine orientale).
Ces îles ont des particularités par des origines volcaniques, au relief montagneux, culminent à 1 850 m, au mont Ross. Les côtes ont des formes disparates, très découpées, sont entaillées de fjords profonds. L’intérieur des terres est parsemé de nombreux lacs et étangs. La région occidentale est surmontée par la calotte glaciaire Cook qui s’étend sur 400 km2.
Il y règne un climat froid mais non glacial (les températures moyennes d’été sont inférieures à 10 °C mais celles d’hiver sont supérieures à 0 °C), extrêmement venteux.
HISTOIRE
Chronologie des expéditions et missions aux îles Kerguelen
La recherche de la Terra Australis
Ce n’est qu’au XVIIIe siècle que débuta la recherche d’un continent dont on soupçonnait une vaste avancée à l’est de Madagascar.
Le premier à partir en quête de ce « continent austral inconnu » fut Jean-Baptiste Charles Bouvet de Lozier, qui descendit dans l’Atlantique sud jusqu’à être arrêté par les glaces, puis poursuivit en direction de l’océan Indien.
Mais les explorations dans les très hautes latitudes australes ne seront véritablement lancées qu’à la fin du XVIIIe siècle : durant les années 1770, l’océan Austral fut pénétré par plusieurs explorations.
La découverte de Kerguelen
Moins d’un mois après que Marion Dufresne eut découvert deux groupes d’îles, par 46° de latitude sud, dans l’océan Indien, et quelque 1 500 km plus à l’est, un autre Français, le lieutenant de vaisseau Yves-Joseph de Kerguelen de Trémarec, découvrit d’autres îles subantarctiques qui portent aujourd’hui son nom.
Lorsque le 13 février 1772 Yves de Kerguelen, commandant la flûte la Fortune, aperçut de hautes terres s’étendant à perte de vue, il crut avoir touché une pointe avancée de ce fameux continent, la Terra Australis Incognita.
Rentré en France, son succès fut tel qu’il fut désigné pour commander une seconde expédition, qu’il effectua à bord du Roland, accompagné de la frégate l’Oiseau et de la corvette la Dauphine, durant l’été austral 1773-1774, avec mission de reconnaître les rivages de la « France australe ».
Cette campagne fut un échec : le retour en France fut, cette fois, peu glorieux. Kerguelen fut radié de la Marine, dégradé et condamné à plusieurs années de forteresse.
Lors du premier voyage, Charles de Boiguehenneuc, enseigne à bord du Gros-Ventre, débarqua dans le sud-ouest de l’île pour effectuer la prise de possession au nom du roi. Au second, ce fut un officier de l’Oiseau, de Rochegude, qui effectua une seconde prise de possession dans le nord de l’île.
Le passage du capitaine Cook
Lors de son troisième voyage autour du monde, chargé par le gouvernement anglais de vérifier les découvertes des Français, le capitaine Cook retrouva d’abord les îles découvertes par Marion Dufresne : le groupe des îles du Prince-Édouard et l’actuel archipel Crozet. Puis il atteignit la terre découverte par Kerguelen et pénétra, le 25 décembre 1776, dans une baie qu’il nomma Port-Christmas. Cook y retrouva les preuves de la seconde prise de possession française du 6 janvier 1774, par de Rochegude. Il démontra aussi que cette terre n’était pas le vaste continent espéré, mais une île qu’il envisagea tout d’abord d’appeler « île de la Désolation » en raison de sa stérilité ; pour marquer sa considération envers le découvreur, il décida de la nommer « île de Kerguelen ».
Au XIXe siècle, cent ans de chasse aux phoques
Peu après que furent connues les découvertes de ces îles, notamment à partir de 1783 par les récits du troisième voyage de Cook, les chasseurs commencèrent à s’intéresser à ces régions.
Ce furent tout d’abord les baleiniers qui hantèrent ces parages, à la recherche de ressources qui s’amenuisaient partout ailleurs. Rapidement, ils prirent pied sur presque toutes les îles périantarctiques pour y chasser les éléphants de mer et, surtout, les otaries en raison du plus grand bénéfice que l’on tirait de leur peau.
La première campagne de chasse à Kerguelen dont on a gardé trace est celle de quakers baleiniers de l’île de Nantucket, qui parcoururent les océans Atlantique et Indien durant deux ans et demi (1791-1794) à bord de leurs navires, l’Asia, l’Alliance et le Hunter, et s’arrêtèrent dans l’archipel durant quelques mois, de décembre 1792 à mars 1793, pour y chasser l’éléphant de mer. À partir de cette époque, on trouve de nombreuses mentions de campagnes baleinières et phoquières comme, en 1798, celle de la Nancy commandée par William Swain, de New Bedfort.En 1799, le capitaine anglais Robert Rhodes vint à Kerguelen sur le Hillsborough et passa huit mois à port d’Hiver (golfe des Baleiniers). Il explora et cartographia les côtes nord et est et fit considérablement avancer la connaissance de l’archipel.
La présence des marins anglais, à la recherche de nouveaux terrains de chasse, va rapidement devenir dominante, tant à Kerguelen que dans tout l’océan Indien austral, et le restera jusque dans les années 1820.
Les phoquiers alimentaient les marchés européen et chinois des fourrures vestimentaires.
Cette industrie atteignit rapidement son apogée : les otaries furent chassées jusqu’à être proches de l’extinction et, dès 1820, les populations étaient en forte diminution.
Face à la pénurie, les phoquiers s’attaquèrent alors aux éléphants de mer qui devinrent une source importante de fourniture d’huile.
Les chasses à l’éléphant de mer et à la baleine étaient des industries étroitement liées, car l’extraction de l’huile à partir de la graisse était identique : les produits, de qualité équivalente, étaient employés aux mêmes usages.
Les chasseurs de New London
Le secteur de l’archipel de Kerguelen (et de l’île Heard) fut, jusque dans les années 1870, et de manière intensive, l’un des principaux terrains de chasse des baleiniers et des phoquiers.
Vers le milieu des années 1840, il devint le domaine d’élection des chasseurs de New London et le resta pendant 30 ans.
On trouve l’île de la Désolation mentionnée pour la première fois dans les registres de navigation de New London, en 1844, lorsque le Charles Carroll, commandé par le capitaine Long, quitta ce port, le 26 juin, pour une campagne d’un an à Kerguelen.
Le pic d’activité se produisit entre 1850 et 1860 : durant plus d’une décennie, les baleines et les phoques furent chassés sans ménagement, dans l’archipel et au large. Vers la fin des années 1850, le commerce fut si important que les différentes espèces s’épuisèrent progressivement.
Au début du dernier quart du XIXe siècle, l’industrie de la chasse phoquière était en déclin sensible et, vers 1885, elle touchait pratiquement à sa fin, car les populations d’éléphants de mer avaient été si durement décimées qu’il devenait difficile d’en tirer profit.
Les expéditions scientifiques
Il y eut, au cours du XIXe siècle et au début du XXe, plusieurs campagnes scientifiques et d’exploration, quelquefois organisées en coopération internationale. La liste est longue des expéditions qui se succédèrent dans l’archipel de Kerguelen, certaines n’y passant que quelques jours, d’autres y séjournant de longs mois. Parmi les plus importantes, citons d’abord celle de l’Erebus et du Terror, commandée par sir James Clark Ross, qui, se rendant en Antarctique, s’arrêta à Kerguelen de mai à juillet 1840.
Cette expédition explora les baies profondes du voisinage de Port-Christmas et fit d’importantes observations magnétiques, géologiques et botaniques.
Au cours de sa campagne océanographique mondiale (de 1873 à 1876), la célèbre expédition de la corvette anglaise HMS Challenger, commandée par sir George-Strong Nares, passa à Crozet puis séjourna à Kerguelen, en janvier 1874, pour y faire des relevés hydrographiques et préparer l’installation des missions chargées d’observer le passage de Vénus devant le Soleil. Peu après, trois missions astronomiques anglaise, américaine et allemande s’installèrent à cette fin durant quatre mois, d’octobre 1874 à février 1875.
Amenée par le Volage, la mission anglaise s’installa dans le golfe du Morbihan, tout comme la mission américaine amenée par le Watara. Le navire de guerre la Gazelle transporta la mission scientifique allemande et la déposa à l’anse Betsy.
La mission astronomique française du commandant Mouchez séjourna à l’île Saint-Paul, et l’un de ses savants, Charles Vélain, vint à Kerguelen, à bord d’un baleinier norvégien, en novembre 1874, pour y faire des relevés géologiques et biologiques. Ces missions rapportèrent une importante moisson d’observations : météorologie, topographie et hydrographie, zoologie…
L’expédition océanographique allemande de la Valdivia séjourna quelques jours à Kerguelen, en décembre 1898. Elle fut suivie, trois années plus tard, par l’expédition antarctique du Gauss qui fit escale à Kerguelen, en janvier 1902.
Avec le navire transporteur Tanglin, cette expédition installa, dans la baie de l’Observatoire (golfe du Morbihan), une petite mission de trois savants allemands et deux marins qui séjournèrent là de janvier 1902 à avril 1903.
Les récits des savants et des naufragés
Quelques savants et officiers de marine qui participèrent aux campagnes d’exploration et de recherche scientifique, ont laissé d’intéressantes relations de leurs séjours et des descriptions détaillées des îles Kerguelen.
Les naufrages étaient fréquents : il s’agissait le plus souvent de phoquiers, car le métier était risqué et les innombrables allées et venues à proximité des côtes n’allaient pas sans de nombreux accidents.
Beaucoup n’en revinrent pas, mais ceux des survivants qui prirent la plume ont laissé de saisissantes évocations de leurs aventures et de leur mode d’existence.
Le plus célèbre des naufragés est John Nunn, jeune marin anglais dont la chaloupe se fracassa sur les rochers de la Désolation. Avec ses trois compagnons, il mena une vie d’errance et de précarité durant 25 mois avant d’être secouru.Le récit de leur expédition de plus de quatre ans (juillet 1825 à août 1829) fut publié en Angleterre en 1850. L’un d’entre eux, James Lawrence, le capitaine de la Favorite, élabora la première esquisse cartographique de l’archipel.
Un demi-siècle plus tard, le capitaine Joseph J. Fuller écrivit les mémoires de sa vie consacrée, durant 35 ans (1860-1895), à la chasse à l’éléphant de mer aux îles Kerguelen.
Une grande partie de son récit décrit les épreuves qu’il endura durant un an, avec vingt-deux marins, suite au naufrage de sa goélette, la Pilot’s Bride, en 1881.
Entre John Nunn et Joseph Fuller, il faut placer Nathaniel W. Taylor, médecin à bord d’un navire baleinier, qui décrivit sa longue expédition (1851-1853). Grâce à ces trois narrateurs, nous avons une bonne idée de ce qui se passait au cours du XIXe siècle sur « l’île de la Désolation ».
L’affirmation de la présence française au XXe siècle
Plus d’un siècle après sa découverte par des Français, et malgré les prises de possession officielles, l’archipel de Kerguelen n’était encore pas vraiment français, faute d’occupation effective, et demeurait de fait sans propriétaire.
Conscient des risques de cette situation, le gouvernement français envoya l’aviso Eure confirmer la souveraineté française sur Kerguelen, ce qui fut fait le 2 janvier 1893 en deux endroits de l’île : la baie de l’Oiseau et le bassin de la Gazelle.
La concession des îles subantarctiques françaises fut accordée, cette même année, à Henry et René-Émile Bossière, fils d’un important armateur du Havre, afin qu’ils en assurent la mise en valeur.
Les difficultés furent considérables, et il fallut attendre près de 15 ans pour percevoir quelques résultats. En 1907, les frères Bossière rétrocédèrent à la firme anglo-norvégienne Storm Bull et Cie leur autorisation de chasser, et un établissement fut installé à terre pour traiter industriellement l’huile de phoque et de baleine. Telle est l’origine de Port-Jeanne-d’Arc, station construite en 1908 à Kerguelen, dans le golfe du Morbihan, et qui fonctionna jusqu’en 1926. Les frères Bossière tentèrent aussi, à plusieurs reprises, à Port-Couvreux sur la côte nord, l’élevage du mouton qui se solda par des échecs.
Malgré un remarquable esprit d’entreprise, les frères Bossière ne parvinrent jamais à surmonter leurs difficultés financières. Ruinés, ils cessèrent toutes activités dans le courant des années 1930. Néanmoins, avec eux et depuis le début du XXe siècle, la présence française avait commencé à s’affirmer à Kerguelen, et elle ne fera que s’amplifier jusqu’à nos jours.
En mars 1908, arriva à Kerguelen le J.-B Charcot, petit voilier armé par de jeunes français, les frères Henri et Raymond Rallier du Baty, accompagnés de quatre matelots : une initiative individuelle à l’origine d’une mémorable exploration scientifique.
Ils passèrent 15 mois dans l’archipel qu’ils parcoururent en tous sens et visitèrent systématiquement. Le capitaine Raymond Rallier du Baty revint à Kerguelen pour compléter ses observations, d’octobre 1913 à avril 1914, à bord du ketch la Curieuse, avec les officiers Loranchet et Sante-Lanne Gramont, et six marins. On doit notamment à ces pionniers des travaux d’hydrographie, de topographie et une première reconnaissance géographique approfondie de l’île.
René Bossière, alors administrateur de la Compagnie générale des îles Kerguelen, Saint-Paul et Amsterdam, fut l’instigateur du premier voyage du géologue Edgar Aubert de la Rüe qui séjourna avec Andrée, son épouse, d’octobre 1928 à février 1929 à Kerguelen, pour en effectuer l’exploration minière.
Ils y retournèrent pour une mission mandatée par le gouvernement français, en 1931. Plus tard, de décembre 1949 à janvier 1950, Edgar Aubert de la Rüe participa à la première mission qui fonda l’actuelle base de Port-aux-Français, puis, toujours accompagné d’Andrée, il acheva son œuvre lors d’un hivernage de décembre 1951 à janvier 1953. Il fut le premier à donner une description géologique et une esquisse détaillée de l’intérieur de l’île.
Au cours de la décennie 1930, des avisos de la Marine nationale effectuèrent de courts passages, en profitant pour faire des levés hydrographiques. Après l’Antarès en 1931, ce fut le Bougainville en 1939. Puis la Seconde Guerre mondiale vint suspendre toute nouvelle expédition française.
Cependant, plusieurs navires de guerre allemands fréquentèrent les rivages de Kerguelen : en 1939, ce fut tout d’abord le croiseur Schleswig-Holstein, puis en 1940-1941, trois corsaires, l’Atlantis, le Komet et le Pinguin, qui intervenaient dans les océans Indien et Pacifique, vinrent s’y abriter.
Afin d’assurer la sécurité de ces parages, la Royal Navy australienne envoya le croiseur Australia qui posa des mines dans plusieurs détroits et quelques-uns des meilleurs mouillages.
Depuis le milieu du XXe siècle, une base scientifique permanente : Port-aux-Français
Dans les années qui suivirent la fin de la guerre, la création de stations météorologiques et d’observatoires scientifiques, par plusieurs nations, en Antarctique et dans les régions subantarctiques, amena la France à créer des établissements similaires dans ses îles de l’océan Indien austral et en terre Adélie.
Le 11 décembre 1949, l’aviso Lapérouse débarqua à Kerguelen une équipe chargée de préparer l’installation d’une première mission permanente qui arriva en janvier 1951.
En 1955, la France érigea l’ensemble de ses possessions antarctiques et subantarctiques en territoire autonome qui prit le nom de Terres australes et antarctiques françaises (TAAF).
Dès lors, les missions se sont succédé annuellement sans interruption dans la base de Port-aux-Français, affirmant définitivement la présence française appuyée principalement sur l’activité de recherche scientifique.
Depuis maintenant plusieurs décennies, de nombreux laboratoires ont été développés dans des domaines très variés, touchant aussi bien les sciences de l’univers que les sciences de la vie.
Les îles subantarctiques françaises figurent, en effet, parmi les rares endroits à ces latitudes où il est possible d’enregistrer les données géophysiques de notre planète (sismologie, magnétisme, ionosphère, chimie atmosphérique…).
De même, le suivi à long terme des populations animales et végétales constitue l’une des priorités de ces laboratoires. Les variables démographiques de la plupart des espèces d’oiseaux marins, de pinnipèdes et de poissons sont ainsi enregistrées de longue date : plus d’un demi-siècle pour certaines d’entre elles.
Texte de Jean-Claude Bousquet
KERGUELEN
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