Au départ, en 2000, ce site avait été conçu comme un album photos familial à l'usage des "hivernants et estivants de la 18^ème". L'objectif était de conserver un lien entre nous, et puis aussi de pouvoir partager cette aventure avec nos familles et nos proches. Tous les documents et photos avaient été émis par de nombreux contributeurs.

L'évolution de la technologie a fait que ce site devait évoluer et s'adapter aux nouvelles technologies, comme les tablettes, et à la haute définition des écrans. Chemin faisant, avec le recul de 50 ans, j'ai ressenti le besoin de le remanier, et d'y ajouter quelques informations et historiettes complémentaires, que j'espère intéressantes et sympas.

Cette aventure ne comportait pas de grand danger. Elle était maîtrisée depuis quelques années par les TAAF. C'était la 18^ème fois qu'une mission était organisée, et une expérience était déjà acquise. Certains d’entre nous en avait fait leur métier et étaient presque des permanents.

Il y avait certainement pour chacun un ou plusieurs intérêts: financier, carrière scientifique, points de retraite, une forme de liberté, un moyen de faire un service national intéressant, le besoin d'une vie différente, quitter quelque chose, rompre, vivre une expérience humaine, un peu d'aventure bien bordée...

Cependant les nouveaux, inexpérimentés, ne savaient pas vraiment comment cela allait se passer. Ils avaient peut-être idéalisé, simplifié ce choix. Chacun savait qu'il était là pour 15 mois, sans retour possible. Mais ce savoir n'est pas concret. Quand le bateau finit par partir, un grand vide se fait ressentir, et c'est un ressenti physique. Je ne pense être le seul à l'avoir vécu.

Et s'il se passait quelque chose à ceux que l'on a quittés ? Et, si, et si... En ayant un peu plus réfléchi, on ne serait peut-être pas parti...

A l'arrivée sur l'île, il y a beaucoup de monde: ceux qui vont repartir, ceux qui viennent pour la campagne d'été et ceux qui hiverneront. En fait on ne connaît que ceux avec lesquels on a effectué notre stage de préparation. Sur place, on va découvrir avec qui on va séjourner, et l'on voit bien que l'on est différents, jusqu'à l'humour, qui n'est pas ressenti de la même façon, des blagounettes un peu lourdingues...

Rapidement, on distingue des groupes et des sous groupes qui se superposent et s'entrecoupent: les pros, les militaires, l'Armée de Terre, la Marine, les "scientifiques", les jeunes, les Réunionnais, les déconneurs, les animateurs, les calmes, les responsables, les grandes gueules, les introvertis, les raconteurs, les râleurs... Enfin, bref, notre société placée dans une boite de Pétri. Cependant, on doit bien avoir quelque chose en commun...

Au fil du temps, malgré nos cultures de départ différentes, on va se mélanger, se comprendre, s'accepter, s'estimer. Et c'est pour ça que c'est intéressant de nous observer, et de voir qui nous étions et quelle sera la suite.

Toujours est-il que cela fait 52 ans aujourd’hui (en 2020) que cela s'est passé, et qu'on a toujours beaucoup de plaisir à se revoir au fil des années.

A Estaing en septembre 2000

Comment peut-on expliquer ça ? La 18^ème n'est pas une exception. Toutes les missions semblent reproduire ce type de lien très fort. Une association, créée en 1982, l'AMAPOF, regroupe ceux qui ont vécu ces moments dans d'autres missions. Cette association s'appelle désormais l'AMAEPF.

Jacques Nougier, géologue, un ancien qui a pas mal bourlingué dans l'Antarctique et les régions australes de 1962 à 1976, a réalisé un DVD qui s'apparente un peu à ce site. Il y raconte la 12^ème mission de 1962. Son DVD s'appelle le "Syndrome Austral".