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IMBERT Bertrand
Campagne d'été Dumont d’Urville 1949 Ingénieur hydrographe Hivernage Dumont d'Urville 1951 Adjoint scientifique Campagne d'été Dumont d'Urville 1956 Chef de mission Hivernage Dumont d'Urville 1957 Chef de District
Photo famille Imbert
TÉMOIGNAGE EN SOUVENIR DE BERTRAND IMBERT Mesdames, Messieurs et cher(e)s ami(e)s, À la demande de Blaise Imbert et au nom de l'association des Expéditions Antarctiques Françaises de l'Année Géophysique Internationale, je voudrais rendre hommage à Bertrand Imbert qui vient de nous quitter, terrassé par la maladie. Bertrand n'avait pas pu participer au dernier rassemblement de ses compagnons de l'Année Géophysique Internationale qui en 2010 avait été organisé en Alsace. Nous avions tous déploré son absence d'autant qu'il était, avec Robert Guillard, l'un des derniers membres fondateurs de notre amicale qui rassemble périodiquement tous les membres des trois expéditions de l'Année Géophysique Internationale. Sa disparition brutale nous interpelle tous et laisse à présent un grand vide au sein de notre association. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, les canons se sont enfin tus et la recherche scientifique reprend ses droits ainsi que l'exploration du continent antarctique qui avait été abandonnée durant toutes ces années de guerre. Depuis la découverte de la Terre Adélie par Dumont d'Urville en 1840, aucun Français n'était retourné sur ces terres. En 1950 les Expéditions Polaires Françaises installent leur première base en Terre Adélie. Le navire de la marine nationale, baptisé Commandant Charcot, débarque onze hommes sur le continent. Dirigés par André Liotard, ils vont hiverner à Port Martin. Cette base, implantée sur le continent, porte le nom de l'un de leur camarade décédé au cours de la traversée. L'année suivante, une seconde expédition qui compte dix-sept hommes débarquent à Port Martin. Ils sont commandés par le lieutenant de vaisseau Michel Barré, avec comme second un jeune ingénieur hydrographe du nom de Bertrand Imbert. Le 23 janvier 1952, la base est totalement détruite par un incendie. Désormais, les bases françaises seront installées plus à l'Ouest, sur une petite île de l'archipel de Pointe Géologie, l'île des Pétrels, qui se trouve en bordure du continent. À cette époque déjà les scientifiques ont conscience que pour comprendre la vie et l'évolution de cet immense territoire de glace, il faut un projet international avec un programme commun d'observations et de recherches. C'est le géophysicien anglais Llyod Veil Berkner qui, le premier en 1950, suggère l'idée d'une grande concertation internationale. Réunis à Silver Spring dans le Maryland, dans la maison de James Alfred Van Allen, en présence de plusieurs collègues américains, ils posent alors ensemble les bases de la plus grande aventure scientifique jamais entreprise à un niveau international. La proposition est soutenue par plusieurs comités internationaux et finalement soumise au Conseil International des Unions Scientifiques (ICSU) qui, réuni à Amsterdam en 1952, adopte le projet et retient le nom d'Année Géophysique Internationale (AGI). Un Comité Spécial, présidé par Sydney Chapman (Grande-Bretagne), est créé par l'ICSU ; son bureau est constitué par Lloyd V. Berkner (Etats-Unis), Marcel Nicolet (Belgique), Jean Coulomb (France) et Vladimir Beloussov (U.R.S.S). Le programme scientifique couvre pratiquement tous les domaines des sciences physiques de la Terre : le géomagnétisme et les aurores polaires avec une attention toute particulière pour l'étude des relations Soleil-Terre, la météorologie, la glaciologie, l'océanographie, la géodésie, la gravimétrie et la sismologie. Bertrand Imbert est en mission hydrographique au Maroc quand il est contacté par l'Académie des Sciences. Rentré à Paris en cette fin d'année 1954, il est reçu par Pierre Lejay, président du comité national de l'Année Géophysique Internationale, Jean Coulomb, Henri Lacombe et André Danjon. Ce sont eux qui depuis près de deux ans œuvrent pour que la France puisse jouer un rôle à sa mesure dans l'exploration de l'Antarctique. Trois expéditions sont prévues durant l'AGI, elles auront pour mission d'installer et de faire fonctionner deux observatoires. Le coût de ces opérations est d'un milliard de francs, soit plus de cent cinquante millions d'euros. C'est beaucoup et peu à la fois, car la tâche est immense et les moyens qu'il faudra mettre en oeuvre pour mener à bien ces expéditions à l'extrême sud du monde, sont sans précédent. C'est à Bertrand Imbert que le sous-comité antarctique français, constitué en 1953 par le Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) pour préparer l'Année Géophysique internationale, décide de confier la direction des expéditions françaises. Bertrand a déjà participé à deux campagnes en Antarctique, en 1949 et 1950. Cette fois il s'agit pour lui de participer à un programme scientifique international, avec la perspective de travailler en étroite collaboration avec des chercheurs du monde entier et en particulier avec les Américains et les Soviétiques qui à cette occasion engageront d'énormes moyens sur le continent antarctique. Pour Bertrand, la tâche la plus importante et la plus difficile est de recruter ceux qui participeront aux opérations sur le continent blanc. À l'époque, très peu d'hommes ont l'expérience des régions polaires. Pour la logistique, il va faire appel à des équipes d'expériences, aguerries aux conditions climatiques difficiles des régions polaires arctiques et, pour la science, il va faire confiance à de jeunes universitaires, polytechniciens et normaliens sans expérience polaire particulière, mais plein d'enthousiasme et volontaires pour participer à cette extraordinaire aventure. Trois expéditions vont se succéder en Antarctique. La première, dirigée par Robert Guillard, un ancien du Groenland, partira de France en octobre 1955. Robert Guillard a pour mission d'implanter les deux bases françaises en Terre Adélie. Les deux autres expéditions, emmenées par Bertrand Imbert et par Gaston Rouillon, se succèderont à partir du mois de décembre 1956 pour couvrir les dix-huit mois de l'AGI. Avec leurs équipes respectives, Bertrand Imbert et Gaston Rouillon mettront en place et conduiront les programmes scientifiques retenus par le sous-comité antarctique. D'emblée, Bertrand Imbert choisit de baptiser les deux bases françaises du nom de Dumont d'Urville et Charcot, en hommage à ces deux grands explorateurs français sans qui la France n'aurait peut-être jamais foulé ce continent. Dumont d'Urville, la base principale, abritera une vingtaine d'hommes et sera installée à la côte, sur l'île des Pétrels dans l'archipel de Pointe Géologie. La seconde, la station Charcot qui sera la base française avancée, sera implantée à plusieurs centaines de kilomètres à l'intérieur du continent à proximité du pôle magnétique Sud. Sur les quarante-huit bases qui seront implantées par les douze pays présents sur le continent, seule la France, avec les Etats-Unis et l'Union Soviétique prennent le risque d'hiverner à l'intérieur du continent antarctique. Pour Bertrand Imbert, la France doit être présente à l'intérieur du continent antarctique. Il s'agit pour lui d'un véritable challenge. Sur la calotte glaciaire, les conditions de froid sont extrêmes, exacerbées par des vents violents qui soufflent quasiment en permanence. Il sait que pour les hivernants, les conditions de vie seront à la limite de la sécurité. Il sait aussi que les trois hivernants de la station Charcot seront totalement coupés du monde pendant une année entière et ceci sans aucune possibilité de relève. Mais Bertrand la veut cette station sur le plateau antarctique. Il sait que cette mission sera déterminante à la fois pour l'étude du champ magnétique terrestre, l'étude de la glace et du climat. Voilà l'homme qui grâce à sa volonté, sa ténacité, son courage, sa passion pour la recherche scientifique, a su conduire une soixantaine d'hommes à la réussite. Nous tous qui avons participé à ces expéditions de l'Année Géophysique internationale n'avons jamais oublié cette belle aventure. Merci Bertrand de nous avoir donné la passion de ces régions extrêmes, appris la tolérance et fait connaître ce sentiment de profonde amitié qui nous lie tous et qui ne s'est jamais démenti au fil des années. Roland Schlich 25 janvier 2011
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